Bernard Cosey

Cosey sur Wikipedia

interview réalisée en mars 2007

Bibliographie

: - A la recherche de Peter Pan (Dupuis)
- Le Bouddha d'Azur (Dupuis)
- Champéry été 1863 (Dupuis)
- Une aventure de Clarence (Dupuis)
- Jonathan (Le Lombard)
- Joyeux Noël, May ! (Dupuis)
- Orchidea (Dupuis)
- Le Retour de la bête (Dupuis)
- Saïgon - Hanoï (Dupuis)
- Une maison de Frank L. Wright (Dupuis)
- Le Voyage en Italie (Dupuis)
- Zeke raconte des histoires (Dupuis)
- Zélie Nord - Sud (Le Lombard)

Quel métier voulait tu faire quand tu étais enfant?

Je voulais être Laitier. Le laitier circulait à Lausanne avec une voiture électrique, très silencieuse et distribuait le lait. Je trouvais ça génial, mais c'était quand j'avais cinq ans.
Très vite vers huit-neuf ans, j'ai voulu faire de la bande dessinée, écrire des romans ou faire du dessin animé. Comme tous les enfants, je lisais les journaux de Mickey, de Spirou et j'avais envie de faire ça. Je recopiais les images qui m'avaient plues et j'écrivais des romans qui était des plagiats complètement nuls du "Club des 5" (sourire).

Quelles lectures de jeunesses t'ont le plus inspirées?

Le club des 5, Bob Moranne... La plupart des albums Dupuis. J'étais très Spirou et Fantasio, Gil joudan, Johann et Pirlouit, Jerry Spring, Chlorophylle,Clifton, jean Valhardi, les Pieds Nickelés. La Bande dessinée Belge des années 50-60.

As tu suivi des études pour faire de la BD?

Non, et la BD semblait inaccessible en Suisse. J'ai fait un apprentissage de graphiste, une formation pratique à 80% dans une agence de pub avec un jour théorique par semaine.
Être graphiste dans une agence de pub m'a permis d'apprendre à lier un texte à une image. Aujourd'hui encore, ça m'est très utile.

Pourquoi?

J'ai appris à concevoir une image. Je trouve que chez certains dessinateurs, qui dessinent pourtant très bien, il manque parfois les images manquent d'organisation, de composition. C'est souvent du dessin brut sans une réelle réflexion sur l'espace.

Par ailleurs, pendant cet apprentissage, j'ai lu une interview d'un jeune dessinateur suisse, Derib. Je lui ai téléphoné, nous nous sommes rencontrés et nous avons très vite lié amitié. Dès que j'ai fini mon apprentissage, je suis allé travailler chez lui. Un deuxième apprentissage, pas formel bien sûr, on s'amusait beaucoup et j'ai beaucoup appris simplement en le regardant faire.

Raconte nous tes premières publications...

J'ai débuté en publiant dans le Soir, un quotidien belge. J'ai dessiné trois histoires de huit pages que Duchâteau a accepté d'écrire. C'était très généreux de sa part d'accepter d'écrire pour ce jeune helvête débutant.
Ensuite j'ai fait Paul-aroïd , dont j'ai réalisé moi-même le scénario,dans 24 heures, (le quotidien Lausannois) et enfin un scénario avec Jacques Ralf "un shampoing pour la couronne" qui était à la base une pièce radiophonique. Si mes souvenirs sont bons, France Gall jouait le rôle de Clarence.
Il a été décidé d'en faire une bande dessinée et j'ai été choisi pour en faire les dessins.

Quels souvenirs gardes tu de cette expérience?

J'étais content d'avoir du travail et d'être payé pour mes dessins. Mais... J'avais déjà le projet d'un personnage perdu dans l'Himalaya.

As tu eu du mal à faire accepter Jonathan par un éditeur?

Jonathan a été refusé par tous les éditeurs, mais je ne l'avais pas proposé à Lombard, éditeur de Derib, car j'étais conscient de faire du ? sous Derib ?. J'étais son élève, donc je pensais que ce n'était intéressant ni pour eux, ni pour moi. C'est à ce moment là que j'ai accepté Clarence. J'ai reçu un jour une lettre de la rédaction de Tintin. Henri Desclez était rédacteur en chef et remplaçait Greg. Il avait été le rédacteur en chef du Soir Quotidien, qui avait un cahier de bandes dessinées. Il m'écrivait pour m'annoncer sa nomination à Tintin et me dire que si j'avais un projet je n'avais qu'à passer le voir. C'est ce que j'ai fais en compagnie de Derib avec le projet de Jonathan qu'il a tout de suite accepté.

Qu'est ce qui t'a donné envie d'écrire une histoire comme celle de Jonathan?

Je pense que c'est une question d'affinité personnelle. Comme Giraud pour le western, j'aimais et j'aime toujours la montagne et la spiritualité. J'avais lu Alexandra David-neel, Tintin au Tibet, et je me suis dit ? Pourquoi pas? ?

Étais tu déjà allé au Tibet?

J'y suis allé plusieurs fois, mais j'ai pratiquement dessiné les trois premiers albums avant de m'y rendre, parce que le Tibet était encore fermé à l'époque. En en 1976, alors que je dessinais la fin du troisième Jonathan, j'ai appris par deux sources d'informations différentes que le Ladakh ouvrait ses portes, qui étaient closes depuis1950. Mon amie et moi avons donc entrepris le voyage. Nous avons eu énormément de chance d'être au courant si vite.

Et ce que tu as trouvé, correspondait-il à l'image que tu t'en étais fait?

Oui, j'avais très peur d'être déçu. Pourtant, ça m'a permis de dessiner Jonathan en toute sérénité alors qu'avant j'y allais doucement.

Et auparavant comment faisais tu pour te documenter?

Comme la plupart des dessinateurs : bouquins, librairie, bibliothèque... Le fait de m'y être rendu m'a donc donné de la confiance. J'y suis retourné cinq fois, dans des régions différentes. Le Tibet est un très grand pays et tous ces voyages ont énormément contribué à mon travail.

As tu déjà montré ce que tu faisais à des Tibétains?

Bien sûr! J'ai toujours reçu un très bon accueil, je pense qu'ils sont heureux et surtout amusés qu'on s'intéresse à leur pays de cette façon.

Actuellement, quelles sont tes motivations pour continuer Jonathan?

Je les attends. Je ne dessine pas sans motivations. Je travaille sur différentes pistes parfois sans savoir s'il s'agit d'un Jonathan ou d'autres choses. La forme définitive ne se détermine souvent qu'au dernier moment. C'est ma façon de faire. Je cherche à m'amuser. Le lecteur ressent le plaisir de l'auteur et produire à la chaîne ne m'intéresse pas.

Quelles ont été tes sources d'inspirations pour le diptyque ? à la Recherche de Peter Pan ??

Mes vacances d'enfant au Valais y ont tenu une grande place, mais je me suis aussi inspiré de mes souvenirs avec Derib, dont la famille a un chalet dans une très belle vallée valaisane. Nous y sommess retournés régulièrement.

As tu comme Derib avec Buddy Longway fait un jeu de mot avec le héros de cette Histoire?

Non, je trouvais simplement que ça sonnait bien, ? Woodworth ?. Par contre j'ai prénommé Jonathan en hommage à Jonathan Livingston le Goéland, d'après le roman de Richard Bach, que j'ai adoré.

Est-ce que prévois de clore un jour l'histoire de Jonathan?

Je sais pas. Je n'ai pas réellement de fin prévue. La seule chose que je sais, c'est que pour réaliser un nouveau tome, je dois vraiment en avoir envie.

Tu en relis des anciens avant de te lancer dans une nouvelle histoire?

Oui, quand je les ai oubliés. J'aime bien relire mes album et des fois je suis épaté (rire) et d'autres où je suis déçu mais c'est intéressant.

Parle nous un peu de Saigon Hanoi...

Une partie de ma famille est américaine. Quand j'étais jeune, je regrettais de faire partie de la famille suisse... mais maintenant c'est différent, même si j'aime toujours l'aspect culturel et artistique américain.
J'ai imaginé ce qui se serait produit si j'étais parti en Amérique. J'aurai fait partie de la génération qui a été envoyée au Vietnam. J'ai eu l'occasion de visiter ce pays lors de l'ouverture des frontières. Là bas , j'ai rencontré des vétérans qui étaient revenus vingt cinq ans après. C'était très impressionnant. En rentrant j'ai voulu faire quelque chose, mais je n'y suis pas arrivé tout de suite. J'ai laissé cette tentative de scénario de côté pour réaliser Orchidéa, et c'est seulement après cela que j'ai pu enfin trouver la forme que pouvait prendre cette histoire vietnamienne.

Ça a été difficile à réaliser?

Oui, je ne savais pas comment traiter ça, car c'était tellement fort que j'avais peur de passer à côté de choses essentielles. J'ai pris conscience alors d'une chose intéressante : la documentation que l'on fait au repérage peut être un piège. On prend des photos de choses extraordinaires, mais ce que l'on voit est tellement fort que lorsqu'on le dessine par la suite, ça n'a pas la force du témoignage pour le lecteur. Quand vous vous promenez au Vietnam et que vous voyez de jeunes vietnamiens jouer sur une carcasse de char américain, c'est quelque chose de très troublant, mais une fois la scène dessinée, le lecteur la voit comme une fiction. C'est le piège.

Tu a dessiné ? voyage en Italie ? avant ton voyage au Vietnam. As tu eu des surprises par rapport à ce que tu t'attendais à voir?

En ce qui concerne le Vietnam en lui-même, non. Par contre, j'ai été troublé par les vétérans en pèlerinage là bas. Ce fut très fort pour moi, et je ne trouve pas que ce soit bien exprimé dans les fictions, à part dans ? Deer Hunter ? (Voyage au bout de l'enfer).On oublie de dire que là ou la guerre du Vietnam a fait le plus de mort, c'est au retour, avec les suicides et les overdoses.

Dans Saigon Hanoi, y a t-il une symbolique particulière dans les couleurs des bulles que tu as employées?

Symbolique est un grand mot, je dirai qu'il y a un code pour faciliter un petit peu la lecture.
La couleur indique qui parle. L'album a été traduit en anglais dans une édition en noir et blanc, je pense que ça passe aussi très bien comme ça.

Tu as reçus des prix pour Jonathan et Saïgon Hanoi, beaucoup de dessinateurs qui reçoivent des prix sentent une pression par la suite, est-ce ton cas aussi?

Oui, je l'ai ressenti, mais ça s'oublie vite. Recevoir un prix cela fait toujours très plaisir (sourire).

Le fait que tu ais reçus des prix t'a t-il facilité l'acceptation de projets par les éditeurs?

Oui. Quand j'ai reçu un prix pour ? Kate ? à Angoulême, l'éditeur a été ravi pour la promotion des ventes. Cela justifiait sa confiance...
D'ailleurs à ce moment là, j'avais un nouveau projet avec ? À la recherche de Peter Pan ? mais l'éditeur m'a dit ? Non, maintenant que tu as reçu ton prix pour Kate, il faut que tu continues Jonathan absolument ?. Alors j'en ai dessiné un de plus, pour faire plaisir à l'éditeur, et après je suis passé à ? À la recherche de peter pan ?. L'éditeur a dit ? Ok! Fais toi plaisr mais refait nous ensuite vite un Jonathan ? (rires). Et ? À la recherche de Peter Pan ? est resté depuis ma meilleures vente au Lombard.

Avec Orchidéa, tu parles de l'amour famillial, comment est né ce projet?

J'avais envie d'aborder des sujets peu courants en bandes dessinées, cela permet d'éviter les clichés. J'aime bien explorer des terrains correspondant à ce que je ressens personnellement. C'était la démarche que j'ai suivie avec Jonathan, je voulais parler de ce que je ressens vraiment. Si je faisais un Western, il serait moins bien dessiné que Giraud (Blueberry)! En explorant son terrain personnel, on a plus de chance d'être à son sommet.

Tu dessineras de nouveau sur le thème de l'amour famillial, avec la mère de Zeke dans "Zeke raconte une histoire"...

Oui, cette mère qui est à la fois abominable et charmante. Ses sujets me touchent plus que des complots mondiaux créer au Vatican. En tant que lecteur j'adore, mais moi j'ai rien à raconter là-dessus (rire).

Le rôle de la femme est toujours important dans tes bandes dessinées. Dans Joyeux Noël May, elles deviennent le pilier de l'histoire. Comment est née cette histoire?

La bande dessinée est étrangement masculine. Il y a très peu de femmes auteurs, ce que je ne comprends pas, comme je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas plus de femmes compositeurs.
Je suis fasciné par les relations des femmes entre elles. Je n'ai pas les fantasmes qu'on pourrait imaginer, j'aime simplement entendre des conversations féminines dans un bistrot... Alors je me suis dit : "Pourquoi ne pas en parler?".

En 2003, tu te lances dans l'anthologie avec "la maison de Frank L.Wright ". Quel a été ton but ?

Je n'avais pas réellement de but. D'ailleurs, je n'ai pas tellement l'impression de maîtriser mon travail, mais plutôt de l'appeler. Je cherche ce que j'ai envie de dessiner, je ne m'impose pas de thème. Je note toutes les idées qui me passent par la tête et j'en réutilise une partie. Pour cette anthologie, j'ai par cette démarche abouti à deux idées. Je crois que c'était "la petite tulipe rose" et une autre dont je me souviens plus. Ces deux histoires étaient trop courtes pour être traitées en un album chacune. Mais elles étaient légères, et finalement c'était agréable de travailler sur quatorze pages. J'ai donc décidé d'en chercher deux autres, dans le même thème, celui de l'amour mais loin des clichés habituels. Je voulais explorer la limite de l'amour. Jusqu'où il peut aller? Où est-ce qu'il commence?
J'avais d'ailleurs un titre provisoire que je regrette un peu... C'était "Is this Love?". Mais je l'ai abandonné car c'était le titre d'une chanson, et il a été repris dans les publicités pour Mini. Faire un hommage à la chanson, ça ne me dérangeait pas, mais la publicité c'était génant. J'ai choisi alors le titre d'une des quatres histoires.

Tu as collaboré avec Fabrice Clément dans "Champerry-été 1963" , comment ça s'est décidé?

C'est une commande. Le "Patrimoine Champérollain", qui est une association a but non lucratif cherchant à promouvoir le patrimoine de cette région avait décidé de publier quelque chose, et ils se sont décidés pour uen bande dessinée. Ce qui est amusant c'est que l'un d'entre eux me connaissait, car nos deux fils jouaient au rugby. Lors d'une des réunions de l'association, Fabrice Clément a dit "Ce serait génial que Cosey accepte de dessiner, mais faut pas rêver" et le papa du rugbyman a dit "Moi, je connais bien Cosey". Il m'a téléphonné, les conditions étaient bonnes et j'ai accepté.
D'ailleurs, j'ai réalisé plusieurs fois des travaux de commande. J'en ai refusé un qui était notable. C'était l'agence française de retraitement des déchets nucléaires qui voulait faire une bande dessinée pour expliquer aux jeunes que tout allait bien, et qu'il n'y avait aucun souci, avec des dossiers scientifique à l'appui. C'était financièrement très tentant mais j'avais entendu des avis scientifiques contraires sur ce sujet, et n'étant pas capable de faire le discernement, j'ai préféré refuser. Je ne voulais pas risquer de me tromper, par rapport à mes lecteurs. Je n'avais pas envie, dans vingt ans, de me sentir mal par rapport à ça. J'accepte des boulots de commande si ils ne sont pas trop ambigüs.

Comment s'est passée ta collaboration avec Fabrice Clément?

Il est éthnologue et connaît bien la région dont il est natif. Il a écrit le scénario. Je l'ai corrigé pour l'adapter, le transformer en scénario de BD. Nous avons discuté et échangé nos différents points de vue.

Ce fut une expérience enrichissante?

Oui, tout à fait. C'était très sympathique. J'ai dessiné en tout 28 demi-pages sur un sujet que j'aime bien: un petit village valaisan. C'était reposant pour moi, car un scénario est souvent difficile à réaliser. Ici, il suffisait d'adapter les idées de Fabrice Clément ce qu'on a fait ensemble par échange d'e-mail, Fabrice se trouvant alors aux U.S.A. L'avantage des travaux de commande, c'est qu'il y aun objectif, un but à atteindre alors que quand j'écris moi-même un scénario, mon objectif c'est de faire plaisir aux lecteurs. Et c'est tellement vaste que c'est difficile.

As tu déjà lu des histoires d'une personne à qui tu aimerais demander un scénario pour l'illustrer?

Oui mais je serais frustré. Je suis pas un illustrateur. Pour une commande, ça va. J'aime écrire les scénarios même si j'ai beaucoup de difficultés. J'y tiens!

Et tu serais tenté d'écrire un scénario pour quelqu'un?

Oui, ça me tenterait mais j'ai tellement de difficulté à écrire mes propres scénarios que quand j'arrive à une idée qui me plait, je ne veux pas la vendre à qui que ce soit (rire). Si c'était plus facile, j'aimerais bien faire ça.

Tu racontes une autre histoire sur le Tibet avec Le bouddha d'azur, comment est né ce projet?

Disons que quand on aime un sujet, on aime l'explorer sous tous les angles. Je suis allé au Ladakh, au Népal, dans les vallées d'ethnies tibétaines, puis a Lhassa. J'ai assisté au réveillon de la nouvelle année, qui a lieu lors de la première pleine lune de Février, dans un monastère Tibétain. Certains monastères sont de vrais villes, dans lesquelles six milles moines peuvent vivre. J'ai dessinées ces fêtes extraordinaires dans le Bouddha d'Azur. Tout ce qui y est décrit, c'est le nouvel an tibétain dans cette province de l'Ambo.
Toujours avec mon ami photographe Jean-Pierre Grandjean, je me suis également rendu dans la province du Kham où la résistance tibétaine était la plus forte. C'est une région sauvage et difficile d'accès car les visas sont souvent refusés par la Chine. Mais par une astuce, nous avons réussi à la visiter.

Comment travailles-tu tes couleurs?

J'utilise de la gouache. Je réfléchis beaucoup lorsque j'utilise la couleur. Je me base plus ou moins sur les théories de Johannes Itten qui était un graphiste, un grand professeur du Bauhaus. Il a développé une théorie de la perception de la couleur selon laquelle nos perceptions sont "comparatives". On perçoit toujours un élément par autre chose. On ne peut pas parler de lumière sans se réferer à l'obscurité. Si par exemple on prend un gris neutre et qu'on le place sur un fond jaune, ce gris a l'air de tourner au violet parceque le violet est la couleur complémentaire du jaune. Par exemple, pour "Saïgon Hanoï" qui est très jaune, on peut avoir l'impression de voir des plages violettes, mais c'est faux, au mieux ce sera du gris. L'effet est voulu.

As tu eu des surprises lors de l'impression de tes bandes dessinées?

Oui, toujours. Mais là c'est pathologique (sourire). Sur les bons à tirer je commence à transpirer (rire).

Il y a une omniprésence de la neige dans tes histoires, entretiens-tu un lien particulier avec cet élément?

Bien sûr, j'adore la neige. Au point de vue du dessin, je trouve très interressants les paysages de neige, parcequ'en géneral les plans horizontaux disparaissent et on ne voit plus que les plans verticaux. C'est comme une interprétation du paysage.
Ce qui me fascine, c'est qu'on peut ne pas dessinner la neige. Beaucoup de dessinateurs s'évertuent à le faire, mais moi je trouve cela beaucoup plus drôle de ne pas la dessiner, puisqu'on travaille sur du papier blanc! Je dessine simplement le rocher, le sapin, le personnage, et l'ombre bleue qui donne des indications sur la neige. Je trouve cela très symbolique très spirituel.

Tu l'as démontré avec la couverture du tome 2 " A la recherche de Peter pan"..

Oui. J'estime, encore aujourd'hui, que c'est d'ailleurs la meilleure couverture que j'ai réalisée. J'ai dû me battre pour la faire accepter par l'éditeur. Il me disait :"C'est très beau, tu es un artiste, mais c'est invendable". Je me suis vraiment battu pour cette couverture et j'ai bien eu raison.

En moyenne, tu passes combien de temps sur une planche?

Pour le dessin, trois jours.

Au niveau professionel, quel aura été ton plus grand défi?

J'en vois deux: "Étre publié dans un journal" et "Avoir un album". Pour moi, c'étaient vraiment LES grands défis. Ça n'est pas de la modestie, c'est sincère, car je ne fais pas partie des gens qui sont doués de naissance et qui dessinent facilement. Mais si vous pensez le contraire, ça veut dire que je cache bien mes limites (sourire).

Et ta plus grande joie professionnelle?

Je pense que c'est mon premier album. Le premier "Jonathan".

Quels sont tes futurs projets?

En ce moment, il y a surtout la monographie chez Daniel Maghen, qui s'appellera "Echo". Et puis je travaille sur deux projets de scénarios: un de Jonathan et un one-shot. Le one-shot est le plus avancé. Quand je coince sur l'un, je passe à l'autre et vice versa. Quand un des projets sera satisfaisant, je passerai à la réalisation.

De quelle initiative as tu décidé de faire ce projet avec Daniel Maghen?

C'est lui qui me l'a proposé. J'ai vu ce qu'il a fait avec Juillard ("Entracte") et cela m'a mis en confiance. Mais le mien ne sera pas aussi épais (sourire).

Que penses tu de la production de bandes dessinées actuelles?

J'aime énormément "Socrate le chien" de Blain. J'ai adoré lire le "Peter Pan" de Loisel, "Le cahier bleu" de Juillard, les carnets de Sfaar. Dans les mangas, j'aime bien Taniguchi.

Quel conseil donnerais tu à un jeune dessinateur qui veut se lancer dans la B.D.?

J'en donnerai deux qui semblent contradictoires."Ne pas avoir peur de s'inspirer de ceux qu'on aime", donc copier les dessinateurs qu'on aime serait le premier. En même temps, il faut chercher ce qu'on a à dire et que les autres ne peuvent pas dire eux-même.
Tout le monde n'est pas auteur complet, mais ça reste valable dans tous les cas. Si un jeune dessinateur cherche un scénariste, il doit chercher ce qu'il a à dire en dessin, tout en s'inspirant de ceux qu'il apprécie. Lorsqu'on aime quelque chose, c'est parceque cela s'approche de ce qu'on est. Copier certains dessinateurs c'est se retrouver, en quelque sortes. En tout cas on apprend beaucoup.
Donc, il faut bien étudier ce que l'on apprécie et chercher son terrain, son plaisir.

Si tu étais un personnage de B.D. Lequel serais tu?

Tout dépend... Celui que je souhaiterai être, ou celui que je me sens être? Je souhaiterai être le Marsupilami mais je me sens être Jonathan. Un lecteur m'a dit "Jonathan c'est la version customisé de son auteur" (rire). Moi, je pense que je suis l'ombre de Jonathan, sa face sombre.

Merci. Continue de nous faire rêver avec tes albums!

Merci, je m'y efforce mais c'est pas si facile.