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Le féminisme

Il y a quelques semaines, un article est paru sur le blog "ça fait genre", pour dénoncer le sexisme dans le monde "geek", et particulièrement celui des jeux vidéos. De multiples réactions/discussions ont fleuri sur la toile, sur lesquelles je ne reviendrai pas parce qu'il faut vraiment avoir vécu dans une grotte pour les avoir loupées. :-)

Un point intéressant, ces discussions ont eu pour conséquence d'en entraîner un tas d'autres sur le féminisme et sur ses enjeux. J'ai participé à certaines, et là, stupeur. Stupeur de constater à quel point le féminisme est une idée mal comprise, mal traduite, mal interprétée, par des hommes comme par des femmes.

Bien sûr, je ne prétends pas connaître toutes les branches de ce mouvement somme toute très divers, ni avoir entendu toutes les déclarations récentes. Et je sais que tous les mouvements ont leurs extrémistes. Alors je me contenterai d'exposer ici ma vision du féminisme, celle que je pratique, en tant que féministe moi-même.

Égalité?


Pour moi, l'idéologie féministe principale se résume à un point tout simple: revendiquer l'égalité entre hommes et femmes. Il ne s'agit pas de mettre les femmes en avant mais de refuser la discrimination sociale sur la base du genre, c'est à dire le sexisme. Mais je suis toujours extrêmement surprise de constater à quel point ce concept d'égalité est mal compris.

L'égalité réclamée par les féministes, c'est l'égalité en droit. Réclamer l'égalité en droit entre deux personnes ne signifie pas nier leurs différences. C'est l'égalité en droit qui est citée dans le premier article des droits de l'homme. Quand on dit "les hommes naissent libres et égaux en droit", personne ne sous-entend que les hommes sont tous identiques. On sait bien qu'il y a des forts , des faibles, des gros, des bêtes, des malins, des petits, des grands... Chacun a des qualités, ses atouts, mais aussi ses faiblesses et elles sont différentes pour chacun.

En conséquence, demander l'égalité entre hommes et femmes ne signifie en aucun cas nier les différences entre hommes et femmes, mais demander à ce que tous disposent des mêmes droits et de la même égalité de traitement : accéder aux mêmes apprentissages et formations sans a-priori, être sélectionné sur ses compétences et non pas sur des préjugés. Simple bon-sens.

Concrètement, ça veut dire supprimer le sexisme, à savoir le traitement a priori différent des hommes et des femmes (en dehors du contexte de la séduction, nous sommes d'accord). Si une femme et un homme postulent pour un travail reposant sur la force physique, ils doivent être jugés sur leurs seules compétences, la femme ne doit pas être éliminée d'office parce que c'est une femme. Comme les hommes sont en moyenne plus forts que les femmes, moins de femmes seront vraisemblablement sélectionnées que d'hommes sur ce type de poste, mais si une femme vraiment forte arrive (il y en a, et il y en aura probablement de plus en plus si la société accepte un peu que les muscles des femmes ne sont pas horribles), alors il n'y a pas de raison de la refuser.
De la même manière, si des personnes se retrouvent à devoir travailler à un poste trop dur pour elles, il n'y a pas de raison de privilégier la protection des femmes : il faut protéger tous ceux qui en ont besoin, hommes et femmes.

C'est souvent oublié, mais le féminisme, en conséquence, œuvre pour les droits des hommes à accéder aussi facilement que les femmes aux rôles et métiers dits "de femmes", comme puériculteur (le correcteur orthographique me propose d'office "puéricultrice"...) et à accepter et revendiquer des qualités traditionnellement dites "féminines" comme la douceur, la compréhension, j'en passe et des meilleures. Cette façon de voir coupe en conséquence l'herbe sous le pied à des revendications sexistes de la part des femmes, car il y en a aussi, affirmant que les femmes sont plus ci ou plus ça que les hommes.Dans un sens ou dans l'autre, peu importent les "en moyenne", justifiés ou non : la variation autour de ces moyennes est toujours suffisamment vaste pour que la présélection et les préjugés sur le genre n'aient aucune raison d'être. La plus forte des femmes est plus forte que le plus faible des hommes, le plus doux des hommes est plus doux que la plus dure des femmes.

Dernier détail, rechercher l'égalité signifie également refuser l'effet "piédestal" que peut leur donner la forme flatteuse du sexisme, comme la galanterie. Comme le fait si bien remarquer Maïa Mazaurette ici, nous ne voulons pas d'un monde "galant", où l'on n'est prévenant qu'avec les femmes tout simplement parce que nous voulons d'un monde gentil, où l'on est prévenant avec tout le monde. En pratique : j'accepte tout à fait qu'un homme me tienne la porte si il accepte qu'à un autre moment ce soit moi qui la lui ouvre.

Complémentarité ?

Juste un mot sur cette "complémentarité entre hommes et femmes" que certains voudraient substituer à l'égalité. Cette substitution a été refusée avec raison dans la constitution tunisienne (les tunisiennes sont plus malignes que ce nouveau groupe anti-féministe nommé antigones).
 
La vision égalitaire des genres masculins et féminins n'entraîne ni refus ni déni de la notion de  "complémentarité" qui peut exister entre hommes et femmes mais elle l'élargit : ce qui est complémentaire, ce sont les individus qui se choisissent ainsi sur la base de leur personnalité, pas seulement les hommes et les femmes. On ne considère pas que hommes et femmes sont complémentaires par défaut, c'est à dire qu'on ne considère pas que n'importe quel homme est plus complémentaire en terme de personnalité à n'importe quelle femme qu'une autre femme. C'est d'ailleurs facile à observer n'importe où.

Dans le milieu du travail, il y a besoin de gens qui travaillent bien ensemble, pas nécessairement des hommes et des femmes. Un binôme de travail peut être constitué d'un homme et d'une femme et fonctionner parfaitement bien, mais deux femmes peuvent se retrouver parfaitement complémentaires dans leur travail, comme deux hommes. Idem pour le reste, y compris la vie de famille. La seule chose pour laquelle hommes et femmes sont vraiment complémentaires, c'est fabriquer un bébé. Après, que ce soit l'éducation du bébé ou tous les autres aspects de la vie, peu importe le genre, ce qui compte est la complémentarité de l'esprit et de la personnalité. Ce ne sont pas les couples homosexuels, qui ont bien compris qu'on pouvait être complètement complémentaire d'une personne du même sexe/genre, qui me contrediront.

En conclusion, dans cette vision féministe, peu importe que les femmes et les hommes aient certaines tendances à préférer/être un peu plus aptes à exercer certaines activités, que ces tendances soient innées ou acquises. Ce qui est important, c'est que chacun ait accès aux mêmes possibilités d'éducation, d'activités, d'apprentissage. Peu importe qu'une petite fille joue à la poupée si elle a eu, en toute neutralité (et là c'est difficile) l'accès au même éventail de jouets qu'un petit garçon, pour faire son choix librement.
Égaux, chaque individu sera considéré pour lui-même, ses qualités et défauts propres, sans projections ni a-priori et l'on pourra exprimer toutes la richesse de nos personnalités sans se brider. Accepter que les traits de caractères ne sont ni "féminins" ni "masculins" parce que hommes et femmes peuvent être doux, agressifs, sentimentaux, aimer les macarons et les voitures. On n'a pas besoin d'être viril pour être un homme, ni féminine pour être une femme, chaque individu doit simplement trouver ce qu'il aime et ses affinités par lui-même. Et pour cela, chacun doit pouvoir accéder librement et également à toutes les ressources de la société. Égaux en droits. Au pays des droits de l'homme, ça ne devrait pas être trop dur à demander?

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